En souvenir du bon vieux temps

Aujourd’hui Arina se payait le luxe de prendre son temps. Plus exactement, elle pouvait souffler quelques heures avant de reprendre ses fonctions dans cette entreprise folle et énergivore qu’était Jeongal ((pas plus qu’une autre société en réalité, mais elle aime dramatiser)).

La lointaine ressortissante russe se retrouvait donc ayant quelques heures à perdre avant d’aller au tribunal non par pour défendre un des loulous de Jeongal, mais pour réclamer un dossier. Il était agréable de pouvoir profiter des belles heures de la journée à Jung-gu. Pour en profiter un peu mieux, elle se décida de se perdre dans un lieu qu’elle avait par le passé tant fréquenté : le Wallace Restaurant. Un des meilleurs lieux de restauration de la capitale, chic et élitiste. C’était également le restaurant préféré de feu-son père. A l’intérieur, rien ne semblait avoir changé. Le mobilier rococo était toujours présent ainsi que les serveurs en uniforme distingué. L’un d’eux vint vite à sa rencontre. Elle allait leur demander une table avant de se raviver. Elle avait vu un visage étrangement familier.

Park. Jaesung. Les 3 syllabes  les plus puissantes de Seoul.
Monsieur le Maire. Et également, son ancien fiancé.
Une carte de visite des plus prometteuses.  

« - Je vais rejoindre un ami juste ici, merci pour votre accueil. »

Etait-ce de la folie ? Un manque élémentaire de politesse et de raffinement ? Surement. Arina ne retroussa pas chemin, et se dirigea vers ce cher Maire. Ses talons aiguilles avaient beau claquer sur le carrelage immaculé du restaurant Park Jaesung ne leva pas le nez de son dossier. Où était-ce un journal ?

« - Monsieur Park »

L’homme devant elle ne semblait pas honnêtement si puissant, assis ainsi, absorbé par sa lecture. Il se fondait parfaitement dans la masse. Pourtant … dans cette foule, personne n’était à sa hauteur.

« - Veuillez excuser mon manque de manière élémentaire. »

Comme un papillon de nuit attirait par une lampe allant mener à sa mort, Arina ne pouvait s’empêcher de vouloir se rapprocher de cet homme avec lequel elle avait perdu contact à la rupture de leur fiançailles. Non qu’elle regrette la fin de cette entreprise de rapprochement mercantile entre leurs deux familles, loin de là. Arina n’aimait pas beaucoup être utilisé, encore moins par son paternel. Cependant, Jaesung n’était pas déplaisant, et encore moins, maintenant devenu maire.

« - Permettez-vous que je vous tienne compagnie en souvenir du bon vieux temps ? »

Quel bon vieux temps ? Celui où elle avait peur de rentrer dans un appartement ravagé par l’alcool et la violence ? Celui où elle n’était qu’un outil à la solde de son géniteur sans jamais la moindre reconnaissance ? Jaesung et elle ne s’étaient jamais étendues sur les domaines personnels. Cela était trop dangereux. Peut-être que lui avait aussi souffert d’un père aussi toxique que le sien ? Peut-être qu’il n’était pas trop tard pour reprendre au moins contact entre eux ? Dans ce monde, on n’avait jamais suffisamment d’alliés.  

outfit _ La foule, les mouvements de personnes vaquant à leurs occupations ; parfois sans but aussi. C’était tout aussi agréable qu’un tic tac incessant. Répétitif, qui devenait bien plus appréciable une fois arrêté. Seulement, il connaissait ses limites (( pour l’instant )). Préférant ne pas jeter par la fenêtre tous ses efforts pour arriver là où il était à présent. Dur labeur de plusieurs années durant lesquelles Jaesung eut les pires pensées. Néanmoins, c’était un dégoût profond qui le touchait au plus profond de son âme. La noirceur de cette dernière, les pensées et paroles qu’il pouvait parfois aborder. Tout était si détestable chez ce jeune maire.

Cette réunion eut été interminable. Le regard de Jaesung semblait perdu dans un horizon qu’il ne pouvait réellement voir et pourtant, tous ses sens étaient en éveil. Il écoutait, analysait, le moindre mot, à la virgule près. S’assurant ainsi de toujours posséder la connaissance qui lui sauvait cette précieuse vie. Il avait été convenu qu’ils déjeuneraient ensemble dans ce restaurant connu pour son luxe. Injustice non dissimulée quand autant d’argent se trouvait sur de la décoration et que des populations mourraient de faim de l’autre côté de la rue. Ce n’était pas son problème ─ ça l’était pourtant, en tant que maire. Mais ces insectes rampants qui n’étaient pas assez forts pour survivre n’étaient pas assez bons pour retenir l’attention du coréen.
Ainsi, il suffit d’un regard, une expression cachée sous ces traits immobiles ─ expression que le secrétaire comprit bien rapidement, pour que les invités furent raccompagnés jusqu’à la sortie. La solitude était une très bonne amie du maire, préférant le silence qui l’accompagnait au désordre des lieux publics où être humains et paroles se mélangeaient, donnant des maux de têtes au jeune homme.

L’inconnu déposa un journal sur sa table, légèrement éloignée des autres, du monde qu’il détestait tant. Tout le personnel faisait attention à ses besoin et aucune conversation ne fut sollicitée alors qu’ils connaissaient déjà le menu du maire. Perfection attendue chaque fois, ils n’avaient pas le droit à l’erreur.
Pourtant, le dérangement arriva bien tôt. Aux premières paroles, Jaesung resta concentré sur sa lecture, s’informant de ce qu’il se passait dans sa ville. Quand cette voix (( familière )) s’éleva de nouveau, le maire retint un soupir. Enfin, il daigna lever les yeux, découvrant alors un souvenir du passé. « en effet. » Il ne laissait rien passer, scrutant la jeune femme de ces yeux vides et froids. Les souvenirs pourtant affluaient dans cette caboche, donnant un léger goût de nausées à l’homme qui s’était sorti de cette prison mental que lui avait imposé son paternel. « Park Arina, hm. Qu’est-ce qui vous fait dire que le vieux temps était bon ? » Pourtant, il aurait pu dire qu’il l’était, Arina ayant été ce seul rayon de soleil sur l’échiquier.

Enfin, il déposa ce journal sur un coin de la table, oublié rapidement avant d’inviter la jeune femme à prendre place face à lui d’un mouvement de la main. Aussitôt les serveurs se dépêchèrent pour apporter un couvert supplémentaire. La posture du maire était si droite, si contrôlée et pourtant, il était bien plus libre que la dernière fois qu’ils s’étaient vus. « J’ai cru comprendre que tout se passe bien pour vous. » Pause dramatique, pendant laquelle son regard scanna la demoiselle. « Depuis ce bon vieux temps… Vous ne semblez pas avoir changé. » Puis un sourire en coin, les lèvres légèrement étirées et était dévoilé une première expression.

outfit • Un seul geste suffit à l’inviter. Park Jaesung était un homme simple … à sa façon. Arina ne se fit pas plus prier, et prit place face à son interlocuteur. Siège confortable, décoration soignée, le Wallace Restaurant était fidèle à ses lettres de noblesses.

« - C’est un véritable honneur pour moi de pouvoir partager votre table. »

Il est vrai que leurs situations respectives avaient bien changés depuis leur dernière rencontre. Jaesung avait succédé à son père dans une bataille électorale des plus passionnantes. Quant à Arina … elle était presque honteuse de mentionner Jeongal devant son ancien fiancé. Elle était une avocate prometteuse … ayant sombrée dans ce monde. Elle savait ce qui pouvait être dit sur elle. Cela ne volait pas haut.

Jaesung l’interrogea. C’était une bonne question. Pour qui ce temps était-il bon ?

« - N’était ce pas, comme nos proches n’ont eu de cesse de nous le répéter, les meilleures années de notre vie ? »

Elle allait s’étouffer tellement le mensonge véhiculé par cette phrase, maintes et maintes fois répété, était gros. Certains avaient tendance à idéaliser le passé. Certains avaient tendance à se voiler la face. Et Arina mettrait sa main à couper que ces deux phénomènes étaient liés.

Rina n’aurait pas changé selon Jaesung. Un rictus fut retenu. Rien l’avait changé comme tout avait changé. Son père avait gagné un aller simple pour l’au-delà. Elle avait vendu son âme à un préteur sur gage du quartier le plus malfamé de Séoul, compromettant totalement son avenir jusqu’alors « glorieux » à Jung-gu. La jeune femme à la botte de son père avait disparu de ce monde. Elle ne s’était jamais sentie aussi libre. Dommage que cette liberté l’avait éloigné du pouvoir, une addiction familiale des plus exécrable, qui lui tardait de retrouver. Les PARK avait toujours pris soin de graviter autour du pouvoir. Jamais trop près des projecteurs, jamais trop loin. Le père d’Arina avait était un fidèle collaborateur du père de Jaesung. Les deux hommes s’appréciaient. Ou peut-être pas. On ne sait jamais dans le monde politique. Toujours est-il que c’est de cette amitié que le mariage entre les deux jeunes gens avait été élaboré. Jaesung avait finalement mis fin aux fiançailles dans un acte de rébellion à peine voilé contre son père quelques temps avant la période électorale.

Dans tout les cas, Arina devait rebondir.

« - Il en est de même pour vous. Encore toutes mes félicitations pour votre élection, Monsieur le Maire. »

Faire un pas de travers arriverait bien trop vite. Arina devait surveiller ses actes, et surtout ses paroles en face de Jaesung. Pourtant, elle avait bien l’impression que l’homme devait-elle n’était plus totalement le même Jaesung qu’elle avait côtoyé par le passé … devrait-elle … ? Non. Elle n’était pas en position de poser des questions à ce point proche de la vie personnelle de son interlocuteur.

« - Je ne peux m’empêcher de m’en vouloir de ne pas avoir su garder contact correctement, avec vous. J’espère que vous ne me le reprocherez pas. Ces derniers mois ont été pour le moins … chargé. J’imagine, qu’il est en malheureusement de même pour vous avec les responsabilités qui sont aujourd’hui les vôtre ? »

La ressortissante russe trouvait qu’elle s’excusait un peu trop. Cela pourrait donner une image chancelante de sa personne. Ce n’est pas quelque chose de souhaitable.

« - Sachez que la famille PARK a malheureusement perdu mon regrettable père, mais sa doctrine et ses convictions seront toujours les mêmes. »

Là où le pouvoir sera, la famille PARK se trouvera. Elle pourrait lui proposer son aide. Il n’en aurait surement jamais besoin, mais la proposition était là. Cependant … Arina ne le formula pas pour le moment. La conservatrice était maintenant déchirée entre ses convictions conservatrices, sa gourmandise de pouvoir et son allégeance à Jeongal. Le scorpion sur son dos la brulait parfois, comme pour lui rappeler le pacte fait. En aucun cas, elle ne pouvait compromettre Jeongal si elle ne souhaitait pas perdre la tête.
 

outfit _ Il était habitué aux compliments, peut-être un peu trop. Ces paroles souvent prononcées sans réel sentiments bienveillants à sa suite. Tout était faux. Hypocrites de vautours gravitant autour d’un maire trop jeune à leur goût. Autour de cette étrange créature qui avait un pouvoir qu’ils désiraient plus que tout. Ainsi, aucune réaction ne passa chez le garçon face aux paroles de la demoiselle. L’honneur était évident et la superficialité du maire et ses pensées de supériorité qui l’accompagnaient avaient raison de son mutisme. L’autre n’était rien, l’être humain n’était rien. C’était une créature sale et désordonnée, tout ce que Jaesung détestait par dessus tout. Paradoxe total alors qu’il préférait ne pas penser au fait que, lui-même faisait partie de cette même espèce. Idiot aveugle des réalités alors que le pouvoir détournait son attention. Pourtant, il avait laissé la demoiselle le rejoindre, souvenir lointain face auquel il ne semblait pas aussi dérangé qu’il l’aurait pensé.

Chose encore plus rare encore, moment de faiblesse alors que la maire s’osa à dévoiler un sourire. Légers rire qui secoua ses épaules devant les mots d’Arina. « Les meilleures années de notre vie, certainement. » Comment pouvait-il en être ainsi, alors que cette vie ne lui avait pas appartenue. Alors qu’il n’était que le pantin d’un père autoritaire et désireux d’obtenir plus de pouvoir. « Des gens inconscients qui osaient dire ça. » Il partageait ses pensées ─ grand rareté et pourtant il n’en était pas dérangé. Il était face à une connaissance, face à un passé qu’il connaissait par cœur, qui l’avait forgé. Contrairement à cet autre individu qu’il avait croisé après un drame, démon de ses nuits, incontrôlable, qui continuait de le hantait depuis tellement d’années.
Puis, de nouveau ces compliments, de nouveau le visage qui se refermait alors que l’habitude le fit remercier Arina d’un hochement de la tête. Les premières assiettes firent leur apparition ; de multiples plats qui s’étalaient sur cette table, pour un partage. « Je pense que les félicitations peuvent vous revenir aussi. » Il ne faisait pas attention aux rumeurs, connaissant sa ville par cœur, sachant exactement (( du moins il pensait )) ce qu’il s’y passait. Pourtant, il ne développa pas la raison de ces félicitations.

Le maire jonglait entre bonne entente avec cette charmante femme, rare être qu’il arrivait à supporter, et la lassitude de compliments incessants. Il avait espérait qu’au moins, le temps d’un repas, il pourrait avoir la paix. Laisser de côté cette mascarade dans laquelle il vivait, évoluait. « J’ai entendu pour votre père, mes condoléances. » Pourtant, cette perte le laissait indifférent. Ami cher de son paternel :: un ennemi. « Park Arina. Est-ce là un discours préparé par avance pour satisfaire les ambitions d’un maire superficiel ou est-ce que l’on peut oser croire qu’un semblant de vérité s’y trouve. » Toujours aussi sec dans ses propos, pourtant il cherchait ─ pour une fois ─ cette paix. « Je ne partage pas les pensées ou ambitions de mon père, alors votre discours m’est inutile. » Il souhaitait être un meilleur souverain. Son père, cet ennemi numéro un qui attendait la meilleure occasion pour le poignarder dans le dos. « Mangez, tant que c’est chaud. Je vous invite, mais laissez tomber les faux semblants au moins. » Il ne pouvait se penser hypocrite à prononcer de telles paroles, pas alors qu’il ne couvrait pas la jeune femmes de fausses pensées. Il parlait sa vérité ou il restait silencieux. « Donc dites-moi, me suis-je trompé ou êtes vous réellement restée la même ? »  

outfit • Jaeusng semblait souligner le trait d’humour de cette vie qui avait été dicté pour eux. Allait-il pleuvoir ? Les probabilités d’un tel alignement des astres étaient rares. A moins que cela soit le fruit du hasard ?

Arina ne ressentait plus grand chose à la mention de son père. Il était une relique, certes qui continuait à le hanter, mais une relique du passé.  Il était pourtant la cause de bien de ses traumatismes. Ses mécanismes de défense avait toujours des répercussions à l’heure d’aujourd’hui, notamment dans sa recherche inébranlable, de soutiens, de pouvoir, de sécurité. Elle s’était promis du haut de ses talons hauts qu’elle ne laisserait plus personne l’a laisser plus bas que terre.

« - Je ne vous connaitrais pas mieux, votre faible confiance en ma personne me blesserais, Park Jaesung. »

Visiblement, elle n’avait pas réussi à toucher le maire. On n’apprend pas au vieux singe à faire la grimace. L’ingéniosité et l’habitude des formules étaient dans l’ADN des Park après tout. On ne devient pas Maire par hasard. Il eut au moins la politesse de l’invité à manger. Quel gentleman. La dernière question déconcerta quelque peu Arina. Difficile de dire si elle avait changé. Peut-être que sur ce point-là, elle pouvait se montrer honnête ?

« - A ce que je vois, vous aimez toujours poser des problématiques dont nous avons peu l’occasion de nous interroger dessus. »

Arina eut un sourire. Il était maintenant question d’y réfléchir. Avait-elle changé ? Elle avait le sentiment d’être toujours la même Arina courant à grande enjambé dans Séoul. Aujourd’hui elle ne courrait plus sauver sa mère des coups de son paternel, mais essayer de sortir de loulous -dont elle n’avait que faire- de cellule. Ce monstre cherchant le pouvoir et l’approbation de son paternel n’a pourtant pas tant changé. Il a seulement aujourd’hui faim de sécurité. Pouvait-elle lui en vouloir ?

« - Hum, je pense en effet que vous m’avez fait réalisé certaines choses »

Changer est un mécanisme presque automatique. Trop aveuglé par notre quotidien, nous ne remarquons même les grands changements de notre vie. Une chose était sûre : la Arina de 16 ans -subissant un rendez-vous arrangé avec Jaesung- n’aurait jamais imaginé la vie que menait l’Arina de bientôt 30 ans.

« - Il est indéniable que nous avons changé au fil de ses années. C’est après tout un mécanisme de survie. Pourtant, j’ai l’impression d’être toujours cette petite brunette me collant aux portes des grands séminaires pour pouvoir entendre ce qui pouvait se dire. »

Le temps était assassin. La vie également.

« - Je pourrais vous retourner cette question, si vous me le permettez Park Jaesung. »

Une habitude maintenant de l’imiter, de l’appeler par son nom complet. Il lui semble que par le passé, il s n’était pas aussi formel. Que leur étaient-ils arrivés ? 

outfit _ Pour un repas qui se devait être pris dans la solitude et le bruit incessant de ses pensées sans fin, cette rencontre se dévoilait être relativement agréable. Un sourire avait réussi à être décroché chez le maire et ça, c’était déjà beaucoup. Grand exploit alors que tirer des expressions sur le jeune visage d’ordinaire fermé. Une barrière qu’il met entre lui et les autres. Entre lui et les faibles ; hideux insectes dont il n’avait que faire. Pourtant, Arina et lui faisaient partie de même monde. Les deux se rejoignaient sur beaucoup d’idées et de vécus. Ainsi, ces retrouvailles n’étaient pas plus désagréables.
Seulement, Jaesung ne voulait plus de faux semblants. Pas à sa table, lorsqu’il partageait (( chose rare )) son repas avec une jeune femme. Il n’hésita pas à le remarquer, non sans tenter de piquer cette demoiselle. Pourtant, la répartie de celle-ci fut ce qui capta l’attention du maire. Ils avaient changés, c’était une certitude ─ ils avaient grandi et mûri ; s’était débarrassés tous deux de ce pouvoir que leurs paternels avaient sur eux depuis l’enfance. L’homme se souvenait de ces rendez-vous forcés, cette mascarade qui s’était installée entre Arina et lui, pour former un couple des plus puissants de la capitale. Telle était l’idée, mais rien n’en devint car Jaesung s’était déjà rebellé. « sans problématique, ce monde serait bien ennuyeux, vous ne trouvez pas ? » bras croisés, ce sourire en coin alors qu’il affichait cet air supérieur qui ne le quittait jamais. Et pourtant, au-delà de cette façade pouvait se déceler une pointe d’amusement :: il était amusé, le maire.

« La curiosité est un vilain défaut. » Il pouvait l’imaginer, jeune enfant innocente à chercher la connaissance. Il avait été pareil ─ il l’était toujours. Poussant le vice pour se dire que le pouvoir (( le vrai )) ne pouvait passer ailleurs que par la connaissance. A défaut de savoir se battre, de ne pouvoir utiliser d’arme à feu (( beaucoup trop de saleté derrière )), il pouvait au moins s’imposer par le savoir. « mais la curiosité est ce qui nous maintient en vie ─ ou nous tue. » Peut-être que sa fascination morbide pour la connaissance venait de là. Constamment en équilibre sur un fil prêt à craquer, de savoir que telle information pouvait lui coûter le vie où le sauver dans le chantage.

Puis, il fut surpris par la question retournée. Les bras croisés alors que son dos retomba contre le dossier du fauteuil, le sourcil levé. D’ordinaire, si la personne face à lui aurait été n’importe qui, Jaesung se serait indigné de tels propos, du culot avec lequel la personne demandait des informations. Or, il s’agissait d’Arina et l’atmosphère était plus paisible. « j’espère avoir changé, certainement. » Il s’était libéré des Park. Créer son propre nom et non plus celui de son père. « ne plus être un simple pantin, mais une personne vivant pour elle-même ; je pense que vous comprenez. » Et via cette libération, s’était créé ce gouffre entre lui et les autres ─ cette distance qu’il imposait toujours. Il n’en était perturbé et démarré son déjeuner dans le silence et une sérénité. « je ne pas prétendre être votre  fiancé après ces changements, si c’est ce que vous êtes venue chercher. »  

outfit • La fourchette dans son plat, Arina écoutait d’une oreille attentive les propres philosophique de son interlocuteur. La ressortissante russe n’était pas forcément venu pour discuter rhétorique. Ce n’était pas déplaisant. A force, le langage cru de Jeongal allait déteindre sur ses capacités intellectuelles.

Après tout, es histoires de problématiques avaient quelques choses de temps littéraires. Un vague souvenir de dissertation juridique en 4e année de droit, quelque chose comme ça. Pourtant la vie était faite de problèmes, un enchevêtrement de problèmes. Certains ne faisaient que les croiser, déléguant leurs problèmes aux autres. Des personnes comme Jaesung. D’autres géraient les problèmes des autres. C’était le cas d’Arina, en sa brillante qualité d’avocate.

Tout ceci renvoyait à une dépendance à l’autre. Chercher sa reconnaissance ou simplement l’ignorer. Vivre pour lui ou vivre pour soi.

Vouloir vivre pour soi. Quel magnifique but.
Arina ne pouvait que saluer cette détermination.

« - Ne le prenez pas mal, mais je ne me réalise pas au travers des hommes qui m’entourent.  »

Jouer à la potiche à la maison attendant le retour de son tendre époux, très peu pour Arina. La jeune femme avait toujours souhaité se réaliser par ses accomplissements. Vivant à l’ombre de son père, on lui avait effacé ses réussites d’un revers de main. Il était normal qu’elle réussisse. C’était ce qui était attendu d’elle.

Arina aurait voulu qu’on salut ses efforts, son ingéniosité. Elle s’était contenté de quelques compliments de politesse. Aujourd’hui, l’ambition de son père continuait à couler dans ses veines. Plus elle serait proche du pouvoir, plus elle serait en sécurité.

Elle se savait pourtant en difficulté dans le milieu qui était aujourd’hui le sien. Très bien. Elle se débrouillera pour faire faire le sale boulot par un homme ayant les capacités de lui nettoyer les mains.

« - Cependant je me demande au fond si l’on peut être vraiment être indépendant des autres. Nous cherchons toujours leur approbation, leur admiration, parfois leur aide.  »

L’homme était un loup pour lui-même. L’homme était pourtant un animal social. Quelle étrange contradiction. Arina ne savait que faire de ses contradictions. Son père lui avait toujours dit qu’il fallait mieux être neutre que dans le camp des perdants. Comme c’était ennuyant. Ses démons continuait à la poursuivre.

« - Vous devez me trouver bien ennuyante a avoir des opinions aussi peu tranché.  »

La jeune femme eut un rire poli, avant de reposer ses couverts comme prête à fuir avant sa confession.

« - En dehors de toutes ses politesses, je dois vous avouer quelque chose. Plus que de parler une vieille connaissance, en vous voyant … je cherchais avant tout à retrouver une personne qui me connaisse ...  »

Autrement dit un ami. Parmi l’innombrable nombre de personnes qu’elle côtoyait au quotidien, elle ne voyait pas grand avec lesquels elle pouvait discuter librement.

« - Vous êtes une des rares personnes à ne pas prétende.  »

Et c’était terriblement rafraichissant dans cet océan de faux semblant peuplant leur quotidien. Jaesung était également une des rares personnes à l'avoir connu quand elle était sous l'égide de son père. Il était une relique du passé. Une des dernières.

« - Vous êtes aussi une des dernières personnes à me connaître par le passé. »

Les deux avaient beau essayer d'évoluer, de changer, ils restaient uni spar un passé commun.

« - J'espère que nous pourrons garder contact, cette fois-ci, en regardant vers le futur »